Le prêt viager hypothécaire : une alternative intéressante au viager

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Hugo Jenny - Associé fondateur de Mirabelle

Dernière mise à jour en 2024

L’essentiel en quelques mots : 

Pour les personnes âgées, la vente en viager est parfois envisagée afin de bénéficier de liquidités et de revenus complémentaires à leur retraite. Beaucoup moins connu, le prêt viager hypothécaire (PVH) est pourtant une alternative intéressante dans certaines circonstances à condition d’en mesurer les risques potentiels : 

  • le prêt viager hypothécaire (PVH) permet d’obtenir des liquidités en une fois en contrepartie de la mise en garantie d’un bien immobilier ; 
  • le crédit souscrit n’est remboursé qu’au décès de l’emprunteur ou à la revente du bien de son vivant; 
  • à l’inverse de la vente viagère, l’emprunteur reste propriétaire dans le cadre du PVH (et doit assumer les frais qui en découlent comme les impôts fonciers); 
  • comme pour la vente en viager, l’emprunteur continue à occuper le logement jusqu’à son décès (et doit assumer les frais d’entretien du logement); 
  • le PVH est plutôt destiné à ceux ayant un besoin de financement important pour un projet déterminé (adaptation de l’habitat, travaux, voyage, achat de véhicule) ;
  • la vente en viager permet généralement de bénéficier d’une rente régulière à vie (mensuelle, trimestrielle ou annuelle) en complément d’un capital reçu, dans le cas d’un PVH il faudra utiliser une partie du capital pour l’achat d’une rente viagère si on souhaite également des revenus réguliers à vie ; 
  • le PVH implique un coût global relativement important du fait de taux d’intérêt proches des taux de crédit à la consommation. A la différence de la vente en viager, ce coût dépendra de la durée du crédit alors qu’une vente en viager fige immédiatement l’entièreté des coûts via la décote du prix de vente.
  • à la différence de la vente en viager, le PVH permettra à l’emprunteur de bénéficier de la hausse des prix de l’immobilier, mais continuera de l’exposer également à une possible baisse des prix

Définition du prêt viager hypothécaire et du viager traditionnel.

Le passage en retraite constitue pour de nombreuses personnes une perte de pouvoir d’achat parfois difficile à combler. Pour améliorer leur niveau de vie ou dans la perspective d’un projet particulier (travaux, voyage, achat de véhicule, aides aux enfants, etc.), certains seniors sont à la recherche de solutions bancaires flexibles. Pourtant, à partir de 60 ans, il devient particulièrement difficile de bénéficier d’un emprunt bancaire traditionnel. Les banques estiment en effet bien souvent que les risques de non-remboursement deviennent trop importants avec l’âge et la survenance de potentiels problèmes de santé. Le prêt viager hypothécaire et la vente en viager sont alors deux options intéressantes à considérer pour obtenir des liquidités. Même si elles reposent sur le même principe de la mobilisation du patrimoine immobilier pour bénéficier d’une trésorerie, elles diffèrent par leur nature, leur fonctionnement et les obligations qui en découlent.

Le prêt viager hypothécaire, également abrégé PVH, est un emprunt bancaire permettant à un propriétaire de débloquer des fonds en contrepartie de la mise en garantie de son bien. Avec ce dispositif, les seniors peuvent bénéficier d’un financement relativement important en une fois, sans avoir à procéder à des remboursements périodiques. Ils restent en outre propriétaires de leur bien jusqu’à leur décès ou à la revente et peuvent continuer à occuper le logement. 

Le viager traditionnel pour sa part est une transaction immobilière et non un emprunt. Il n’engage donc aucun remboursement pour le vendeur. Il permet à un propriétaire de revendre son bien tout en continuant à l’occuper jusqu’à son décès. En contrepartie d’un prix de vente minoré par rapport à sa valeur vénale, l’acheteur verse  des liquidités immédiates avec un premier versement important, le bouquet, correspondant à un pourcentage de 20 à 30 % de la valeur du bien, ainsi qu’une indemnité périodique au vendeur (la rente viagère) jusqu’à son décès. Dans certaines transactions, le vendeur verse seulement un bouquet plus important généralement de 40 à 70% de la valeur du bien. Contrairement au PVH, le vendeur n’est plus propriétaire de son bien une fois la transaction entérinée même s’il en conserve la jouissance jusqu’à son décès. Le viager peut prendre deux formes différentes à savoir : 

  • le viager occupé pour lequel le vendeur reste occupant du logement ; 
  • le viager libre dans lequel l’acheteur peut occuper le logement ou le mettre en location.

Les mécanismes de fonctionnement du PVH.

Le prêt viager hypothécaire repose sur les éléments suivants.

Un emprunt sans remboursement immédiat mais flexible 

Contrairement à un prêt personnel classique, le PVH n’implique aucun remboursement à échéances périodiques. La liquidation de la dette contractée (capital + Intérêts non payés durant la vie du prêt) intervient en effet en une fois soit : 

  • au décès de l’emprunteur : la banque revend le bien pour lequel elle dispose d’une hypothèque pour se rembourser ; 
  • avec le produit de la transaction si l’emprunteur décide de vendre son bien de son vivant. Il doit en informer au préalable le prêteur. 

L’emprunteur conserve également la possibilité de procéder à un remboursement anticipé partiel ou total du crédit. Celui-ci doit alors être d’au-moins 10 % de la somme totale et implique des indemnités légales de remboursement anticipé. Il peut enfin décider de rembourser uniquement les intérêts du crédit à échéances périodiques (le plus souvent mensuellement).

Un prêt à durée indéterminée 

Le prêt viager hypothécaire n’implique aucune durée fixe contrairement à un emprunt bancaire traditionnel (un prêt immobilier sur 20 ans par exemple). En l’espèce, le contrat prend fin soit au décès de l’emprunteur, soit à la revente du logement de son vivant ou bien encore s’il décide de procéder à un remboursement anticipé. Cette liberté permet d’avoir un crédit adapté à la durée de vie de chacun mais peut cependant entraîner un certain manque de visibilité quant au coût global du crédit.

Des fonds versés en une fois et utilisables librement 

Lorsque l’accord de la banque est obtenu et que le contrat est signé, le prêteur verse l’intégralité de la trésorerie en une fois à l’emprunteur. Il peut ainsi utiliser les fonds pour améliorer son niveau de vie ou pour financer le projet qu’il souhaite, le PVH étant un crédit non affecté (travaux, achat d’une voiture, voyage, aide aux enfant ou petits-enfants, donation, soins de santé, entrée en maison de retraite, etc.).

Un montant d’emprunt dépendant de la valeur du bien hypothéqué

Pour déterminer l’enveloppe potentiellement attribuable à l’emprunteur, l’établissement bancaire se base sur la valeur vénale du bien immobilier mis en garantie. Pour ce faire, un expert immobilier est mandaté par chacune des parties (les frais sont à la charge de l’emprunteur) pour procéder à une estimation du logement à hypothéquer. À partir de là, un pourcentage est retenu comme base du prêt. Celui-ci est fixé librement par la banque et est généralement compris entre 15 et 60 % de l’évaluation réalisée. Le montant du prêt est toujours inférieur à l’estimation du bien pour anticiper une potentielle chute future de la valeur du bien ou une importante accumulation d’intérêts dû à la longue durée d’emprunt. Le prêteur a également la possibilité de refuser le bien proposé en garantie s’il estime qu’il est susceptible de subir une dépréciation trop importante dans le futur (mauvais entretien, risques naturels importants,…).

Outre la valeur du logement, l’enveloppe de trésorerie accordée tient également compte du profil de l’emprunteur et particulièrement : 

  • de l’âge : un emprunteur jeune cumulera potentiellement plus d’intérêts dans le temps qu’une personne âgée. Le coût global de son crédit sera donc plus important et l’enveloppe accordée s’en trouvera par conséquent réduite ; 
  • pour certains établissements prêteurs, du sexe : l’espérance de vie des femmes étant plus élevée que celle des hommes (85,7 ans contre 80 ans selon les chiffres de l’INSEE de 2023), elles sont également susceptibles d’accumuler davantage d’intérêts que les hommes du fait d’une durée du contrat plus importante. Leur montant d’emprunt s’en trouve alors minoré pour un bien de même valeur.

Des taux d’intérêts plus élevés que pour un prêt immobilier

Pour un prêt viager hypothécaire, la banque est libre de fixer les taux d’intérêt comme elle l’entend à condition que ceux-ci respectent les taux d’usure du crédit. Ces taux d’intérêt sont généralement plus élevés que pour un emprunt immobilier classique et plus proches des taux des crédits à la consommation. Le coût global du crédit peut donc se révéler important pour une longue durée d’emprunt. Des frais de dossier et de garantie sont également à prévoir et sont soit dus immédiatement soit intégrés au sein du taux annuel effectif global (TAEG) présenté à l’emprunteur avant la signature.

Une conservation de la propriété du bien

Le bien est seulement utilisé comme garantie envers le prêteur, l’emprunteur conserve la propriété du bien jusqu’à sa revente, que ce soit de son vivant ou à son décès. Il peut également continuer à l’habiter et à en jouir librement, sous réserve d’en informer le prêteur dans certaines circonstances (mise en location, départ en EHPAD,..). 

Un impact sur la succession

Avec un prêt viager hypothécaire, les héritiers ne peuvent pas recevoir de dette. Ils ont le choix de rembourser en liquidités le prêt et conserver le bien immobilier ou de procéder à la vente du bien pour remboursement de la dette. Généralement, la revente du bien hypothéqué est utilisée pour le remboursement de la dette. Lorsque le produit de la revente est supérieur au coût global de l’emprunt, les héritiers se partagent alors le surplus.Si la valeur du bien immobilier ne suffit pas à rembourser le prêt, c’est le risque du prêteur et aucune dette n’est dûe par les héritiers.

Des obligations qui incombent à l’emprunteur

Puisqu’il conserve la propriété du bien tout au long du contrat, l’emprunteur est également sujet aux contraintes qui en découlent comme le paiement de la taxe foncière. Il doit également maintenir le bien en bon état tout au long de l’emprunt afin d’éviter sa dépréciation dans le temps (entretien du jardin, ravalement de façade, réparations indispensables). À défaut, le prêteur peut exiger un remboursement anticipé du prêt s’il estime et parvient à prouver que l’état du bien s’est dégradé trop fortement par rapport à l’état des lieux effectué au début du contrat. 

Par ailleurs, avec un PVH, l’emprunteur conserve la pleine jouissance du bien hypothéqué et peut donc faire le choix de le mettre en location pour en tirer des revenus. Il a néanmoins l’obligation, pour celà, d’obtenir l’autorisation du prêteur au préalable. 

Les avantages et inconvénients du PVH par rapport au viager.

Par rapport à une vente en viager, le PVH présente plusieurs avantages : 

  • l’emprunteur conserve la pleine propriété du bien et peut l’utiliser comme bon lui semble jusqu’à son décès ou à la revente (possibilité de mise en location). Dans la vente en viager, la propriété du logement passe immédiatement à l’acheteur au moment de la transaction même si le vendeur peut continuer à occuper le logement ; 
  • le PVH permet d’obtenir des liquidités versées en une fois là où les revenus tirés de la vente en viager sont généralement décomposés entre bouquet et rente viagère. Le PVH est donc particulièrement pertinent pour les seniors ayant un projet nécessitant un certain montant de trésorerie ; 
  • les sommes allouées à l’emprunteur dans le cadre d’un PVH ne sont pas imposables (puisqu’il s’agit d’un prêt) à l’inverse des rentes viagères qui sont assimilées à des revenus ; 
  • le prêt viager hypothécaire élimine les problématiques éthiques qui peuvent se présenter avec la vente en viager. Ceux-ci sont notamment liés à la spéculation de l’acheteur sur la durée de vie du vendeur et aux éventuelles pressions psychologiques à la vente du fait d’un besoin immédiat de liquidités.

Le prêt viager hypothécaire présente cependant également des inconvénients, qui, selon les profils et les circonstances, peuvent le rendre moins pertinent qu’une vente en viager : 

  • un coût du crédit qui peut être élevé : le PVH étant un emprunt, il implique nécessairement des intérêts servant à la rémunération de la banque mettant les fonds à disposition. Les taux d’intérêts étant relativement élevés sur ce dispositif, si le prêt dure longtemps le montant cumulé d’intérêts peut devenir très important au point de ne laisser aucune valeur restante aux héritiers. Alors suivant le montant emprunté et la durée réalisée du prêt, le prêt viager pourra devenir plus cher qu’une vente en viager.
  • une obligation d’entretien : en conservant la propriété du bien, l’emprunteur est soumis à une obligation d’entretien du logement et donc aux frais qui en découlent, comme pour une vente en viager.L’emprunteur étant toujours propriétaire il est toujours redevable de la taxe foncière alors que dans une vente en viager c’est l’acheteur qui en assume la charge le bien ayant été vendu.
  • pour les seniors qui ont pour projet d’améliorer leur vie quotidienne et d’assurer leurs vieux jours sans avoir nécessairement de grand projet à financer, la vente en viager peut être plus opportune. Elle assure en effet des revenus réguliers jusqu’à la fin de sa vie et un complément de revenus stable et durable à une pension de retraite. Le PVH implique lui au contraire une somme généralement plus importante, versée en une fois, mais qui peut plus facilement être dilapidée en cas de mauvaise gestion ;
  • enfin le prêt viager hypothécaire est un produit bancaire méconnu et peu commercialisé. Il peut donc être difficile de trouver un établissement permettant de souscrire cette offre à proximité de son domicile, là où la vente en viager est désormais répandue.

Les critères d’éligibilité pour chaque option.

Les critères d’éligibilité au prêt viager hypothécaires sont relativement peu nombreux. Ils sont principalement de deux ordres à savoir : 

  • l’âge de l’emprunteur : pour solliciter un PVH, il faut être majeur. Ce dispositif s’adresse cependant surtout aux personnes de plus de 60 ans. Aucun limite d’âge n’est prévue légalement même si les banques peuvent se réserver le droit de refuser certains profils ; 
  • la propriété : l’emprunteur doit obligatoirement posséder un bien immobilier pour pouvoir procéder à sa mise en garantie. Il doit, seul ou en couple, détenir 100 % du titre de propriété. Le bien doit par ailleurs être situé en France métropolitaine et doit être à usage exclusif d’habitation. Les locaux professionnels ou les locaux à usage mixte (personnel et professionnel) ne peuvent faire l’objet d’une hypothèque. Enfin, le logement mis en garantie ne doit faire l’objet d’aucun cautionnement ni d’aucune hypothèque préalable. À défaut, cette garantie devra être obligatoirement levée pour pouvoir souscrire un PVH.

Les conditions pour réaliser une vente en viager sont elles aussi limitées : 

  • une condition d’âge : là encore, le vendeur doit être âgé de 18 ans au moins. Aucun critère d’âge maximum ne s’applique ; 
  • une condition de propriété : le vendeur doit là aussi détenir la pleine propriété sur le bien mis en vente ; 
  • la possibilité de contracter : la personne mettant en vente le bien doit être dotée du discernement suffisant pour comprendre les conséquences de cette transaction. Les personnes sous tutelle ou sous curatelle doivent ainsi obtenir l’accord du tuteur ou du curateur pour procéder à une mise en vente du bien ; 
  • l’état de santé : l’acheteur ne doit pas avoir connaissance de problèmes de santé du vendeur qui pourraient indiquer l’imminence de son décès. Si le décès intervient dans les 20 jours suivant la vente, la transaction est considérée comme non valable du fait de la prévisibilité du décès. Les héritiers du vendeur peuvent alors faire annuler la vente. 

Les aspects juridiques et fiscaux à considérer

D’un point de vue juridique, le prêt viager hypothécaire se présente comme un emprunt bancaire sécurisé par une hypothèque là où la vente en viager est une transaction immobilière. Dans le premier cas l’emprunteur reste propriétaire du bien là où il n’est qu’usufruitier dans le second. Les modalités d’application de chacune de ces formules doivent faire l’objet d’un contrat écrit détaillant les modalités et notamment : 

  • pour le prêt viager hypothécaire : le montant de l’emprunt, le coût total du crédit et le TAEG (taux d’intérêt fixe, frais de dossier et de garantie et tout autre frais nécessaire à la signature du contrat) ; 
  • pour la vente en viager : le prix de vente ainsi que le montant du bouquet et de la rente viagère mensuelle.

Sur le plan fiscal, le montant de l’emprunt obtenu dans le cadre du PVH n’est pas imposable à l’inverse de la rente viagère qui est considérée comme un revenu même si elle bénéficie d’un abattement important indexé sur la date de survenance du premier versement.

  • 70 % avant 50 ans ; 
  • 50 % entre 50 et 59 ans ; 
  • 40 % entre 60 et 69 ans ;
  • 30 % à partir de 70 ans. 

Le bouquet versé au moment de la transaction est lui en revanche totalement exonéré d’impôt pour le crédirentier

En cas de plus-value lors de la revente, la plus-value viagère est soumise aux mêmes règles que la plus-value immobilière traditionnelle à savoir une exonération totale s’il s’agit d’une résidence principale et une exonération après 22 ans de détention pour une résidence secondaire.

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